On peut être un géant de l’alimentaire et curieusement ne pas disposer de circuits de vente opérationnels partout où il existe pourtant un marché. C’est le cas de Danone France très présent dans les circuits de vente traditionnels mais qui n’était pas présent il y a 6 mois auprès des petits professionnels indépendants, comme les cafés ou les restaurants.
Un e-shop dédié aux petits professionnels indépendants
Dès lors, l’industriel a lancé une boutique en ligne dédiée, un e-shop, à destination de ce secteur spécifique et sans mobiliser de force de vente associée sur le terrain. Ce site e-commerce « B to B » diffuse sa gamme de produits alimentaires, depuis ses yaourts jusqu’aux boissons végétales. Afin de séduire le client professionnel, Danone France s’est inspiré des codes du e-commerce « B to C » employés usuellement avec le grand public. Il tire un premier bilan.
Danone manquait de présence dans le canal des professionnels indépendants comme les cafés, les restaurants ou les boulangeries
Or ces canaux deviennent stratégiques car ils représentent de la croissance et de nouveaux clients. Cela a d’ailleurs joué des tours à Danone puisque ce sont par ces canaux de vente que de nouvelles marques montent en puissance en proposant par exemple des produits alimentaires à base de plantes. Danone France s’est donc employé à combler ce trou dans sa raquette. Ses équipes françaises ont bâti un site e-commerce, baptisé e-shop, opérationnel depuis six mois désormais. Ce site e-commerce s’attache à reprendre autant que possible les codes de séduction et d’achat du commerce « B to C » et des marques qui vendent en direct à leurs clients, en « Direct to Consumer » (DTC) alors que l’on est dans un contexte « B to B ».
Une relation client personnalisée selon le type de professionnel
L’objectif du e-shop était la personnalisation de la relation client. Cette personnalisation prend en compte le fait que l’acheteur est soit un restaurant, soit un coffee shop, soit une boulangerie, etc. mais vise aussi le client final, le consommateur. Le but est de livrer en direct les produits de Danone et d’apporter du service au client professionnel. Cette personnalisation se concrétise grâce à des pages web spécifiques pour chaque acteur selon qu’il s’agit d’une boulangerie, d’un coffee shop, etc. La plateforme e-commerce technique choisie, achetée chez Salesforce, a servi à définir les différentes cibles de professionnels, en termes de tarification et de portefeuille de produits.
« Il ne s’agit pas uniquement de délivrer nos produits, c’est de créer une nouvelle relation. Le client final va découvrir de nouvelles recettes »
Danone France a adopté une approche très « B to C » afin de concevoir cet e-shop. « On ne différencie pas le café restaurant ou le client final dans notre façon de communiquer » explique la responsable. « On parle d’un humain qui a besoin de ressentir une attraction par rapport à nos marques, qu’il soit en train de travailler ou de consommer nos produits. Nous avons fait le choix d’utiliser une approche très ‘B to C’ » ajoute-t-elle. Le site e-shop est conçu afin d’être attractif et vivant, et non comme un outil administratif de passage de commandes. « C’est humaniser un petit peu l’expérience. On veut enlever tout le côté administratif qu’il y avait avant dans la relation client et Danone. On veut l’humaniser grâce à la plateforme pour dévier toutes les interactions humaines sur du service, de la valeur ajoutée et on n’a pas de système de ‘re-commande’ et de ‘je n’ai plus de stock’, etc. » dit-elle.
Le frontend du e-shop s’inspire du savoir faire de Danone en « D to C »
Afin de réussir le projet, Danone France s’est appuyé sur son expérience des sites e-commerce « D to C », Direct to Consumer. « Grâce au ‘D to C’, on sait le type d’images et le type de description marketing qui fonctionnent. Ce que l’on a utilisé du ‘D to C’, c’est comment on gère la partie visible, la partie front-end du site, donc les contenus, le moteur de recherche et comment on optimise cela, la gestion du digital shop » liste-t-elle. En revanche, Danone France n’a pas voulu utiliser l’expérience d’un site « D to C » comme « Evian chez vous », pour la logistique, où ce sont de gros volumes de bouteilles d’eau qui sont livrés aux particuliers.
Pour ce projet, en tout 18 personnes de Danone France ont été mobilisées, venant de plusieurs services
« Il faut être très clair sur l’objectif » souligne-t-elle. Dans le cas du e-shop, l’objectif n’était pas uniquement la vente, ou de permettre aux clients professionnels de recevoir les produits plus facilement, plus rapidement, etc. Il y a toute la notion de service. Il fallait ainsi intégrer toutes les équipes marketing de Danone. « Et il faut trouver les bons sponsors, c’est le plus important. Quand on parle de 17 personnes, c’est 17 personnes pour pousser avec nous le projet. Ce n’était pas une personne du ‘B to B’ qui a lancé le projet. On n’était pas expert du ‘B to B’ chez Danone, on a fait appel à des interlocuteurs externes » insiste-t-elle.
Un projet lancé par l’équipe e-commerce de Danone France
Le projet est parti de l’équipe e-commerce qui a embarqué l’équipe ventes, puis les équipes supply chain et informatique ont été ajoutées. « On ne pouvait pas faire sans l’informatique. C’est là ce que cela a été compliqué de lier la technique avec le business, mais on y est arrivé. Cela a pris plusieurs mois. 70% du succès du site s’est faite sur le choix des bons interlocuteurs chez Danone » relève-t-elle. Si la partie technologique repose sur Salesforce, la livraison des produits est assurée pour sa part en 48 heures par Chronofresh, nouveau partenaire pour Danone et spécialisé dans les produits frais.
« Nous sommes allés chercher 90% de nouveaux clients. Il s’agit de clients que nous n’avions pas dans notre portefeuille de B to B«
Danone France mesure l’intérêt des clients professionnels en analysant le nombre de pages qu’ils regardent et s’ils sont intéressés par les pages sur les services. Danone a pu recruter des coffee shops comme clients, qu’il n’avait pas jusqu’alors. Pour le futur, l’objectif est de recruter 90 000 professionnels clients en 2 ans en France pour le e-shop. Danone France va voir s’il peut ajouter d’autres catégories de produits ainsi que la possibilité d’étendre le projet à d’autres pays, dont d’abord le Royaume Uni et les Etats Unis.
Un déploiement à l’international et via des plateformes de partenaires
Il existe déjà plus de 40 sites e-commerce « D to C » chez Danone, et il s’agira de voir comment harmoniser les sites « B to B » et les sites « D to C », étant donné que les produits sont les mêmes et qu’il il faut que les messages soient les mêmes en « B to B », en « D to C », en quick commerce et en « off line », c’est-à-dire en magasin physique.
Le nouveau circuit défriché par l’e-shop devrait s’insérer dans les plateformes B to B existantes de Danone à l’étranger ou dans de grosses plateformes telles que celle développée par Unilever avec Compra Agora au Brésil. On peut même imaginer que Danone lance ou participe à des places de marché ciblant les professionnels comme celle conçue par Coca-Cola en associant des marques non concurrentes. Ce type de stratégie est soutenu par le français Mirakl, spécialiste de la fabrication technique de places de marché.
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