Transparence des places de marché et des moteurs de recherche : l’Europe vise haut

Dans la lutte du pot de terre contre le pot de fer, le port de terre reçoit le soutien de la Commission Européenne mais la route est encore longue avant une validation définitive d’un nouveau cadre réglementaire sur les places de marché. Le texte validé par le Parlement européen, le Conseil de l’Union européenne et la Commission européenne, met la barre très haut et traduit les difficultés que rencontrent les petites entreprises pour bénéficier d’internet dans les meilleures conditions comme outil de vente.

La protection des PME en tête

Dans un ensemble de nouvelles règles, présentées le 14 février comme une première dans le monde, les places de marché devront être plus respectueuses vis-à-vis des PME qui passent par leurs services pour vendre leurs produits. En particulier, une véritable transparence est demandée en ce qui concerne le calcul du référencement des produits sur leur site et sur les données collectées et partagées. Ces nouvelles règles doivent encore passer par un ensemble de confirmations au niveau européen.

Amazon, Booking, AppleStore et Google dans le viseur de l’Europe

Amazon est bien sûr dans le viseur, mais la Commission Européenne dénombre 7000 plateformes concernées par cette nouvelle réglementation en Europe. En France, on pourra citer CDiscount, eBay, Leboncoin, Rakuten Price Minister, La Redoute, Rue du commerce (filiale de Carrefour) ou la Fnac. Cela concerne également les ventes de chambres d’hôtels passant par Booking.com ou par TripAdvisor ainsi que les portails de téléchargement d’applications mobiles GooglePlay ou AppleStore sur lesquels les développeurs d’applications mobiles cherchent à faire référencer leur application. Cela touche aussi les moteurs de recherche tels que Google ou Bing de Microsoft en matière de transparence de leur classification de leurs résultats. Il n’y a pas que les grands acteurs qui sont ciblés, pointe la Commission Européenne. Certaines startups disposent souvent d’un pouvoir de négociation important vis-à-vis des utilisateurs professionnels, relève la Commission.

Certains petits secrets devront être clarifiés. Le fonctionnement des classifications – que ce soit par un moteur de recherche ou une place marché – devra être transparent. La commission demande que les places de marché et les moteurs de recherche dévoilent les principaux paramètres qui leur servent à classer les produits et les services afin d’aider les vendeurs à optimiser leur présence. Pour autant, cela ne doit pas permettre aux vendeurs de jouer avec le système de classement.

Transparence sur le traitement de leurs propres produits

Dans ce cadre, lorsque la place de marché commercialise ses propres produits en concurrence de ceux des vendeurs hébergés, elle doit indiquer les avantages qu’elle procure à ses propres produits. Les places de marché doivent également révéler les données qu’elles collectent et comment elles les utilisent. En particulier comment elles partagent ces données avec leurs partenaires. Quand des données personnelles sont collectées, les règles du RGPD doivent être respectées.

Interdiction des fermetures de comptes sans explication et sans recours

D’autres règles visent à rééquilibrer les relations avec les petits vendeurs. Les places de marché ne doivent plus suspendre ou résilier le compte d’un petit vendeur de manière soudaine, sans raisons claires et sans possibilité de recours. La plate-forme devra également rétablir les vendeurs si une suspension a été faite par erreur.

Les conditions d’usage devront être claires et intelligibles. Si ces conditions sont modifiées, elles doivent être communiquées 15 jours à l’avance aux entreprises afin qu’elles puissent s’adapter. Si les adaptations sont complexes, les modifications doivent être communiquées plus longtemps à l’avance.

Un système de gestion des plaintes devient nécessaire

La Commission demande que soient mises en place des nouvelles voies de résolution des conflits. Face à des vendeurs trop souvent laissés à eux-mêmes, sans aucun moyen de faire appel ou de résoudre les plaintes lorsque des problèmes surviennent. Cela changera avec les nouvelles règles.

Les petites places de marché sont exemptées

Toutes les plates-formes doivent mettre en place un système interne de traitement des plaintes pour aider les utilisateurs professionnels. Seules les plus petites plates-formes en termes de nombre d’employés ou de chiffre d’affaires seront exemptées de cette obligation.

Les plates-formes devront offrir aux entreprises davantage d’options pour résoudre un problème potentiel par le biais de médiateurs. Cela aidera à résoudre davantage de problèmes à l’amiable, ce qui permettra aux entreprises de gagner du temps et de l’argent.

Application des nouvelles règles 12 mois après leur publication 

Les associations professionnelles d’entreprises pourront amener les plateformes devant les tribunaux afin de faire cesser tout non-respect des règles. Cela aidera à surmonter la peur des représailles et à réduire le coût des procès pour les entreprises individuelles, lorsque les nouvelles règles ne sont pas suivies. En outre, les États membres peuvent, s’ils le souhaitent, désigner des autorités publiques dotées de pouvoirs de contrôle et les entreprises peuvent se tourner vers ces autorités.

Suivi de la mise en place effective de ces mesures

Les nouvelles règles s’appliqueront 12 mois après  leur adoption et leur publication et feront l’objet d’un réexamen dans les 18 mois qui suivront afin de s’assurer qu’elles suivent l’évolution du marché en rapide évolution. L’UE a également mis en place un observatoire des plateformes en ligne dédié pour suivre l’évolution du marché et la mise en œuvre effective des règles.

Selon un sondage Eurobaromètre, près de la moitié (42%) des petites et moyennes entreprises de l’UE ont déclaré utiliser les marchés en ligne pour vendre leurs produits et services. Une analyse d’impact réalisée par la Commission Européenne avant ses propositions a montré que près de 50% des entreprises européennes opérant sur des plates-formes rencontrent des problèmes. Quelque 38% des problèmes concernant les relations contractuelles restent non résolus et 26% sont résolus mais avec des difficultés.

Un parcours de validation encore long

Le 13 février, le Parlement européen, le Conseil de l’Union européenne et la Commission européenne sont parvenus à un accord politique sur les premières règles jamais définies pour instaurer un environnement économique équitable, transparent et prévisible pour les entreprises et les commerçants qui utilisent des places de marché en ligne. Cet accord provisoire doit encore être confirmé par les ambassadeurs des États membres (Coreper) et par la commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs du Parlement. Le règlement sera ensuite soumis au vote de l’ensemble du Parlement et soumis à l’approbation du Conseil des ministres de l’Union Européenne. Les nouvelles règles s’appliqueront 12 mois après son adoption et sa publication.

Une réaction sur “Transparence des places de marché et des moteurs de recherche : l’Europe vise haut” :

  1. Do-Khac

    Bonjour,
    merci pour l’article.
    Il reste trois jours pour apporter votre contribution dans la rubrique « Adaptation des règles de concurrence et de régulation économique » des Etats généraux des nouvelles régulations numériques lancé par le gouvernement avec le Conseil National du Numérique

    https://egnum.cnnumerique.fr/

    Cordialement
    Tru Do-Khac

    Répondre

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *