Eramet, le groupe minier exploite ses gisements de données et crée une IA

Eramet épaule ses métallurgistes avec une IA en Nouvelle Calédonie

Eramet, groupe minier et métallurgique français, présent dans une vingtaine de pays, mise sur ses données et l’intelligence artificielle afin d’être plus efficace dans sa production et réduire sa consommation d’électricité.

Réduction des coûts de production en tête

L’intelligence artificielle (l’IA) a été mise en place en Nouvelle Calédonie sur des fours métallurgiques. « Une meilleure utilisation de nos données et donc de l’IA nous permet d’être plus efficaces et donc de contribuer à la réduction de nos coûts de production » résume Ludovic Donati, Chief Digital Officer d’Eramet. Il a pris ses fonctions en 2017.Des algorithmes permettent aux métallurgistes d’être plus efficaces, et d’agir avec un temps d’avance, en prédiction et non plus en réaction.

« En temps réel, nous avons une cartographie des prédictions qui nous permet de voir comment optimiser notre production »

« En temps réel, nous avons à disposition ce qui se passe dans le four et surtout une cartographie des prédictions qui nous permet de voir comment optimiser notre production. Par exemple, en diminuant l’énergie que l’on met dans le four, ou en maximisant le taux de minerai que l’on entre dans le four, pour améliorer le rendement en nickel » détaille le responsable de la transformation numérique. « Nous avons mis dans les algorithmes l’intelligence des métallurgistes, et l’on met à leur disposition des outils qui leur permettent de faire de la prédiction de risques, cela permet d’optimiser les rendements et notre mix énergétique. Et cela permet de former des métallurgistes à la Data Science, et donc des Data métallurgistes » reformule-t-il.

Les fours ont la taille d’immeubles de 3 étages et produisent du minerai en fusion à plus de 1000° Celsius. Il s’agit de ferronickel qui sert ensuite à produire de l’acier inox. Ces fours sont bardés de capteurs depuis plusieurs années dans le cadre de l’informatique industrielle. Cela donne un historique de données important. « Nous avons des gisements de données incroyables » souligne Ludovic Donati. Les économies d’énergie sont fortement mises en avant. L’usage de la donnée « nous aide à optimiser notre mix énergétique, c’est-à-dire à consommer moins d’énergie car on a des fours qui consomment beaucoup d’énergie. Nous sommes une industrie très électro intensive » rappelle-t-il.

Les algorithmes ne prennent pas les décisions

Les algorithmes sont des outils d’aide et ne prennent pas de décisions. « L’IA est un outil qui va aider le métallurgiste à être plus efficace dans sa prise de décision. L’IA ne décide pas à sa place. Elle apporte des informations complémentaires, voire des prédictions. C’est le métallurgiste qui décide en toute connaissance de cause » poursuit Ludovic Donati. Afin d’améliorer les algorithmes, le savoir faire des opérateurs devrait être transféré au logiciel au fil du temps. « Si le métallurgiste ne suit pas les recommandations, nous essayons d’entraîner de plus en plus l’IA en expliquant pourquoi on n’a pas suivi la recommandation. Cela va permettre à cette IA d’être de plus en plus efficace » décrit le Chief Digital Officer. En pratique, le gain de temps est manifeste. « Auparavant, nous arrivions à expliquer des phénomènes mais avec l’exploitation de toutes les données cela prenait de 4 à 6 jours » rappelle le CDO.

Les métallurgistes, les Data Scientists et la DSI ont élaboré les algorithmes

Le projet a été réalisé en mobilisant la Data Factory créée par Eramet en s’appuyant sur la société de services Cap Gemini. Les métallurgistes avec leurs connaissances, les Data Scientists de la Data Factory et la DSI ont permis d’élaborer les algorithmes connectés à la production. La Data Factory a été mise en place à partir de 2019. Elle comprend une cinquantaine de professionnels, des Data Scientists, des Data Engineer, des développeurs, des Scrum masters et des UX UI Designers, issus des équipes d’Eramet et de Cap Gemini. La Data Factory est chargée de développer des solutions Data et d’intelligence artificielle.

Le Chief Digital Officer entend placer les métallurgistes aux commandes de la solution. Une formation ad hoc est en cours. « Nous avons réfléchi à la manière de rendre les métallurgistes maîtres de l’intelligence artificielle qui les aide à piloter le four » confirme-t-il. Un programme d’acculturation et de formation est en cours. « En Nouvelle Calédonie, nous avons 10 métallurgistes qui sont en train de se former sur un programme en e-learning, pour avoir un premier niveau de connaissance en Data Science. De plus, l’équipe de transformation numérique les accompagne sur des projets ciblés d’amélioration de l’IA pour mettre en pratique les connaissances qu’ils sont en train d’acquérir » présente-t-il.

Maintenance prédictive réalisée avec la startup Monixo

Autre projet récent mené en s’appuyant sur la donnée, on citera la maintenance prédictive des moteurs situés dans les usines d’Eramet, réalisé avec la startup française Monixo. Eramet a testé initialement la solution de maintenance prédictive de Monixo dans son usine de ferronickel de Nouvelle Calédonie. L’enjeu est d’anticiper les pannes, en particulier dans les usines situées dans des zones difficiles d’accès, où les interventions sont plus complexes.

La rentabilité de la maintenance prédictive des moteurs est annoncée avant la fin de 2020

Devant la réussite du test pilote, la décision a été prise de mettre en œuvre la solution au Gabon, en Norvège, au Sénégal et en France. Des centaines de capteurs – 1200 à terme – ont été progressivement installés afin de surveiller les moteurs. En moins d’un an, la rentabilité du projet est annoncée comme devant être atteinte avant la fin de 2020 grâce aux pannes évitées.

Au final, l’usage des données commence à porter ses fruits chez Eramet. « Les premiers résultats sont visibles sur la productivité de nos mines et de nos usines » considère Ludovic Donati. Sa feuille de route est bien remplie. Eramet souhaite de manière générale améliorer la productivité, la performance commerciale, la valorisation des métaux, la consommation énergétique de ses installations et extraire le minerai de manière sélective. Le but est d’assurer une exploitation durable des ressources et de prédire les risques industriels en temps réel.

Usage des données de drones

Cela passe par l’utilisation des données générées par les systèmes d’information d’Eramet, par l’usage de drones – via la société Delair – et des capteurs connectés en grand nombre dans les 39 sites industriels du groupe.  Les développements réalisés en IA pour la Nouvelle Calédonie sont également présents en Norvège sur les fours d’Eramet. Les métallurgistes accèdent à l’analyse d’informations de prédiction sur la qualité de la production et de la performance économique. L’objectif est d’augmenter la production des alliages de manganèse et de nickel. En Suède, Erasteel, filiale d’Eramet, travaillant sur la métallurgie des poudres, déploie une application afin d’optimiser le temps de mise à disposition des aciers haute performance aux clients.

Au Gabon, une nouvelle solution est en phase de validation pour prédire les phénomènes d’usure des voies au sein de la Setrag, filiale d’Eramet en charge de l’exploitation du chemin de fer national. Au Sénégal, des réflexions sont en cours pour améliorer le processus minier afin de le rendre plus agile grâce à des approches liées à la Data Science. Eramet réalise 3,7 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2019 et emploie 13 000 personnes.

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