Ce sont de multiples incohérences dans les fichiers de la sécurité sociale que mettent à jour deux parlementaires dans le cadre d’une mission qui leur a été confiée par le gouvernement pour lutter contre la fraude aux prestations sociales. Nathalie Goulet, sénatrice UDI, et Carole Grandjean, députée LREM de la Meurthe et Moselle, ont présenté le 3 septembre une version de travail de leur rapport.
Un écart de 17 millions de personnes
Parmi les données surprenantes, on dénombre ainsi 84,2 millions de personnes inscrites au registre d’identification des personnes physiques nées en France et supposées en vie (RNIPP), et donc susceptibles de bénéficier d’un numéro de sécurité sociale, alors que l’INSEE recense seulement 67 millions de Français. Cela fait tout de même un écart de 17 millions de personnes.
Autre cas, le rapport révèle qu’il existerait en France 3,1 millions de centenaires, dont la moitié née à l’étranger, alors que l’INSEE recensait environ 21 000 centenaires en 2016. Les données montrent même qu’il existe 11 000 personnes enregistrées sans nom ni prénom.
Face à ces données contradictoires, les deux parlementaires demandent un audit de l’INSEE, du RNIPP et du SNGI (Système national de gestion des identités). Elles proposent également des sécurités telles que la limitation de la durée de validité des cartes Vitale à la façon des cartes bancaires, la nécessité de donner des preuves de vie en particulier pour les allocations vieillesse, l’interdiction de verser des prestations sur des comptes épargne ou des comptes à l’étranger ou via des entreprises éphémères, une meilleure authentification des personnes via des contrôles physiques et le durcissement des procédures de vérification des justificatifs de résidence réelle et des actes d’état civil émis par les mairies.
Désactivation des cartes Vitale
Une carte Vitale devra pouvoir être désactivée. « Pour avoir une carte Vitale, il faut être résident en France. Si on quitte définitivement le territoire, la carte Vitale doit être désactivée. Quand un étudiant Erasmus retourne dans son pays, cette carte Vitale n’a plus lieu de continuer à exister » illustre Carole Grandjean.
En filigrane, il apparaît que le contrôle n’est pas dans la culture des organismes de protection sociale et que ce contrôle sonne comme « une chasse aux pauvres ». Nathalie Goulet estime au contraire que la fraude est l’œuvre de réseaux. Quant à la tâche de vérification, elle devrait être confiée à un service extérieur.
Carole Grandjean rappelle que la France verse 450 milliards d’euros de prestations sociales par an. Elle indique qu’au niveau européen une étude de l’université de Portsmouth chiffre le montant de la fraude entre 3 % et 10 % du montant global des prestations sociales, ce qui représenterait 15 à 45 milliards d’euros pour la France.
De nombreuses anecdotes liées aux risques de fraude
A l’occasion d’une conférence de presse le 3 septembre, Nathalie Goulet et Carole Grandjean ont cité plusieurs anecdotes afin d’illustrer les risques de fraudes. Par exemple, la Caisse nationale d’assurance vieillesse de Marseille a contacté certains assurés par courrier postal afin de vérifier s’ils étaient toujours à la même adresse, 33 000 courriers sont revenus avec la mention « n’habite plus à l’adresse indiquée ». Autre situation, un homme qui a reconnu la paternité de 70 enfants dans toute la France, et qui n’est pas détecté car les informations restent isolées dans chaque caisse locale et non centralisées au niveau national. Enfin, il y a le cas d’un médecin qui intervient dans un Ehpad, et qui réalise 40 consultations dans la journée, mais facture 40 indemnités de déplacement.