Le BLE ou Bluetooth Low Energy est principalement destiné aux objets connectés pour lesquels le besoin en débit de transmission de données est faible. Il est pour le moment utilisé principalement par Paypal et Apple, mais Androïd et Samsung commencent à se l’approprier.
A l’origine il y avait le Bluetooth, un protocole de communication moribond, coincé entre le WiFi et le NFC qui, en dehors des oreillettes pour téléphone et des kits main libre pour le monde automobile, risquait fort de sombrer dans un profond oubli.
L’intuition de Nokia
Pourtant Nokia, le concepteur de Bluetooth, a une intuition en lançant Wibree (autre nom du BLE) : un protocole réseau de type PAN (Personnal Area Network) mais cette fois très économe en consommation électrique, au contraire du Bluetooth, qui s’était vu privé de l’accès au monde mobile à cause de ce péché originel.
Imaginé en 2006, Wibree est officiellement intégré en 2010 par la Bluetooth Special Interest Group (BSIG), l’organisme qui standardise Bluetooth, au sein de la spécification Bluethooth 4.0 puis 4.1. Cette norme reprend à la fois le Bluetooth ancienne manière et sa petite sœur Wibree communément appelée Bluetooth Low Energy ou BLE, un Bluetooth qui consomme peu d’énergie. Le SIG, taquin, imagine même un nom commercial pour « favoriser l’essor » du petit dernier : Bluetooth smart.
Destiné aux objets connectés
Le BLE est principalement destiné aux objets connectés pour lesquels le besoin en débit est faible et l’autonomie cruciale ainsi qu’aux équipements nomades tels que les smartphones, les tablettes, les montres, etc. La portée se compte en quelques dizaines de mètres.
Un certain nombre de profils sont alors définis par les organismes de certification et adoptés pour assurer les interactions entre différents équipements dans les domaines où le nombre de capteurs explose comme le médical, la domotique, le sport, le fitness, etc.
Estimote lance les « beacons », autrement dit des balises BLE en 2012
Puis, la société Estimote créée en 2012 arrive à brouiller encore plus les cartes en lançant l’appellation commerciale beacon (ou balise en français) pour désigner des dispositifs électronique, intégrant antenne et batterie, dialoguant selon la technologie Bluetooth Low Energy. Ces balises ont la particularité d’émettre en permanence des signaux en mode pull.
C’est alors que la société Paypal, spécialisée dans les paiements, propose d’appuyer son paiement physique sur des beacons et qu’Apple, lors de la sortie de l’IOS7 le 18 septembre 2013 introduit le iBeacon en exploitant une lecture restrictive de la norme Bluetooth 4.1.
En janvier 2014, lors du salon CES (Consumer Electronics Show) à Las Vegas, la BLE marque des points, et devient une voie majeure pour le développement de l’avenir de l’électronique grand public. Voila le décor est planté.
Des usages en magasin
Que peut-on faire du BLE en magasin ? Différents usages sont possibles. On parle ainsi de la géolocalisation. L’un des principaux attraits de la technologie des beacons est d’émettre en permanence des signaux. Quelques balises positionnées dans un magasin suffisent pour monter une solution de géolocalisation Bluetooth Smart. Associée avec une solution d’identification et d’authentification, la géolocalisation se prête ainsi à des exercices de type marketing « one to one ».
Autre possibilité, le tracking. Il est possible d’exploiter les déplacements des clients dans un magasin pour en déduire les zones chaudes et les zones froides et l’impact d’une animation commerciale sur le plan de circulation.
Cibler le client en magasin
Le géomarketing est également une possibilité. La connaissance de la position d’un consommateur dans la boutique, croisée avec la possibilité de communiquer avec lui, ouvre l’accès à toute une palette de solutions interactives en mode push.
Le magasin repère un client, éventuellement s’il veut affiner son profil – mais ce n’est pas nécessaire – l’authentifie puis lui envoie une information de type offre commerciale, coupon ou information. Il est possible de contextualiser finement l’offre, de localiser un consommateur en temps réel, afin de donner plus de sens à la promotion. Sur un mode plus serviciel on peut imaginer qu’un client entrant en magasin puisse avoir accès à la liste des services que lui propose le magasin.
Meilleure connaissance du client
Comme l’a montré Paypal, le couple « présence du client et son authentification » est potentiellement en mesure de simplifier l’acte d’achat et de stimuler les possibilités du CRM. Il serait possible de remonter la fiche client sur la tablette du chef de rayon pour à la fois mieux comprendre son client (historique multicanal) et mieux le conseiller.
Ces données quelles soient physiques (géolocalisation, tracking) ou comportementales (géomarketing) sont des mines d’information qu’il serait captivant de remonter dans l’infrastructure Big Data. Cela permettra d’en extraire des régularités statistiques ainsi que des modèles comportementaux plus sensibles à la réalité dans les points de vente. La remontée des informations comportementales permet de suivre l’introduction d’un nouveau concept et d’étudier son impact afin de mieux le comprendre, pour le régler et l’optimiser.
Régler la pression commerciale
Le BLE doit être aussi l’occasion d’offrir de nouveaux services au consommateur afin de fluidifier ses achats, de les replacer dans une perspective cross-canal et de rendre sa visite en magasin plus agréable.
Cela signifie qu’il faudra régler la pression commerciale à un niveau acceptable et, sans doute, profiter de ces technologies pour être plus à l’écoute du client. Les beacons peuvent lui distiller une information appropriée via des services ad hoc si le consommateur a des inquiétudes sur sa santé, son poids, son bien-être, s’il appartient à une communauté ethnique, s’il privilégie la consommation de proximité ou le bio.
Une diffusion lente bien qu’innovante
Le BLE éclaire les perspectives du monde de l’électronique grand public mais il va mettre du temps pour se diffuser jusqu’au plus profond de nos campagnes. Aujourd’hui, la technologie est poussée par Apple qui asssocie iBeacon et iOS7 certainement au détriment du NFC ce qui ouvre un parc significatif avec le décalage du au taux de renouvellement.
D’autres acteurs du monde Androïd dont Samsung poussent le BLE sur les smartphones haut de gamme et les montres connectées. Il semble y avoir une convergence sur l’avenir de la technologie. Mais comme toujours, le diable se cache dans les détails et, à ce jour, personne ne peut dire si ces implémentations technologiques se rejoindront dans un socle assez commun pour assurer une interopérabilité minimale.
La fin des technologies universelles
Est-ce si important ? Il semble qu’aucune technologie réseau ne soit dorénavant universelle. Qu’importe, elles sont souvent complémentaires, se recouvrent parfois, la question est plutôt de réfléchir à des consoles d’administration qui pourront les exploiter au fur et à mesure de leur déploiement grand public.
Pour le commerçant, Bluetooth smart et les beacons offrent des avantages indéniables : localisation du client, interaction, captation de ses comportements. De quoi permettre aux enseignes d’atteindre de nouveaux objectifs métiers ou stratégiques. Nous sommes en présence d’une technologie qui apporte élégamment un plus et qui va dans le sens de l’optimisation de la relation client.
Push en Indoor
De façon plus large, la vraie promesse du BLE réside dans son apport à la géolocalisation indoor associée au mode push, en travaillant sur le « triptyque lieu – instant – contexte ». Il y a là, des possibilités de créer de nouveaux services de consommation au bénéfice du client et qui vont définir des enjeux de concurrence via le levier de l’attractivité sur le consommateur.
Bluetooth et objets connectés
Sur un plan plus prospectif, il est légitime de s’interroger sur l’interaction entre le monde des objets connectés (santé, fitness, sport, domotique,automobile, …) qui adoptent massivement BlueTooth smart et le monde de la distribution.
Un bracelet qui compte les calories dépensées, une chaussure qui indique le nombre de pas parcourus dans une journée, une balance qui décrit la forme de la famille, le capteur de glycémie du smartphone qui détermine un seuil à glucose à ne pas dépasser sont autant de domaines périphériques à la distribution qui vont la rattraper dans peu de temps. Là, l’individu se dévoilera intimement.
Limites éthiques et légales
L’aspect le plus dérangeant tient dans le tracking silencieux que permet l’ensemble BLE et (i)beacons. Il faudra surveiller ce que la CNIL recommande à ce sujet. La généralisation d’une procédure d’Opt In est à anticiper.
En second lieu, on trouve la problématique de la pression commerciale qu’il conviendra de régler finement pour définir un équilibre entre la sollicitation et le rejet par le consommateur (qui est toujours libre d’aller voir ailleurs). Le Big Data devrait pouvoir aider à définir ce corridor.
La question de la vie privée est également posée. Elle atteint son paroxysme lorsqu’on envisage de lier l’activité commerciale avec d’autres mondes, hier encore étanches. Implicitement, ces réflexions conduisent à s’interroger sur le rapport du commerçant avec le consommateur et relance la réflexion autour du VRM (Vendor RelashionShip Management), modèle dans lequel les données personnelles (dont les données comportementales) appartiennent au consommateur.
Pour en savoir plus
https://en.wikipedia.org/wiki/Bluetooth_low_energy
https://www.bluetooth.org/en-us
http://www.bluetooth.com/Pages/Bluetooth-Home.aspx
https://www.paypal.com/webapps/mpp/beacon
Photo : Samsung Galaxy Gear smartwatch, Créative Commons