Le digital en voie de devenir le principal canal de vente des produits de luxe

Le secteur du luxe est à la peine et doit se transformer sur fond de montée en puissance du digital et de préoccupations plus sociétales chez ses clients. C’est ce que montre l’étude réalisée par la société de conseil Bain & Company. La crise sanitaire de la Covid-19 fait subir la plus forte baisse jamais connue au secteur du luxe. La taille du marché descend à 217 milliards d’euros en 2020, c’est-à-dire 23% de moins qu’en 2019, annonce la société de conseil.

Doublement des ventes digitales

Dans le même temps, les ventes en digital des produits de luxe s’envolent et doublent, passant à 23 % du marché en 2020 contre 12 % en 2019. Cela représente 49 milliards d’euros de ventes en 2020 contre 33 milliards d’euros en 2019. Normalement, le numérique devrait devenir le canal principal pour les achats de produits de luxe d’ici à 2025, accélérant ainsi la transformation omni-canal annonce même Bain & Company.

Le quatrième trimestre devrait se solder par un fléchissement de -10% par rapport à l’année précédente

Les prochains mois sont encore incertains pour le secteur du luxe. Le quatrième trimestre devrait se solder par un fléchissement de -10% par rapport à l’année précédente. Ce recul dépendra fortement de l’évolution de la Covid-19 et des restrictions que les gouvernements mettront en place. Et pour l’année 2021, Bain & Company prévoit une croissance de 10% à 12 % et jusqu’à 17 à 19 %.

La société de conseil souligne l’exigence de continuer à dépenser et parfois même d’accélérer le rythme des investissements concernant la plupart des éléments de coût en marketing, en canaux numériques et en coûts des magasins malgré une dégradation des ventes.

Des achats plus locaux du luxe

Pour revenir à 2020, l’augmentation spectaculaire des ventes en ligne se fait aux dépens des canaux physiques, affirme Bain & Company. Le nombre de magasins gérés directement par les marques n’augmentera pas en 2020 et les réseaux de magasins pourraient s’effriter en 2021. Les marques devront adapter le déploiement de leurs réseaux de boutiques à la nouvelle géographie des achats des produits de luxe actuellement plus locale aux pays, faire évoluer le rôle et l’ergonomie des magasins, et maximiser l’expérience client. Face au virus, les touristes doivent privilégier les achats au sein de leurs marchés intérieurs. La part des achats effectués localement a atteint un pic à 80% à 85% cette année et Bain & Company pense qu’elle se situera à terme entre 65% et 70%.

Les marques de luxe seront incitées à renforcer leur contrôle sur les réseaux de distribution multimarques

La transformation devrait toucher aussi les réseaux de distribution multimarques. Les marques de luxe seront incitées à renforcer leur contrôle sur ce canal suite à la diminution du nombre de leurs points de vente, de leurs résultats contrastés et de l’arrivée de nouveaux acteurs.

Toutes catégories confondues, les produits de luxe les plus abordables, dits d’entrée de gamme tels que les baskets, ont vu leur demande s’accroître et ont atteint plus de 50 % du volume vendu en 2020. De nouvelles petites marques innovantes accroissent la concurrence. Elles s’engagent sur le terrain inspirant du développement durable et adoptent des modèles économiques pertinents pour les consommateurs d’aujourd’hui. 

Les expériences de luxe dépendent du tourisme

Bain & Company différencie les « expériences de luxe » et les « produits de luxe ». Dans la première catégorie, on trouve les beaux-arts, les voitures de luxe, les jets privés, les yachts, les vins, spiritueux et la gastronomie. Ces expériences devraient se relever plus rapidement que les produits de luxe, même si elles vont accuser un retard dans la reprise car elles dépendent fortement du tourisme. Le marché du luxe dans son intégralité, incluant les produits et les expériences de luxe, a enregistré le même type de baisse (-23%) et sa valeur est estimée désormais à environ 1000 milliards d’euros.

On observe le dynamisme de marques vendant directement aux consommateurs et ingénieuses sur les réseaux sociaux

Dans le détail des catégories de produits, la crise sanitaire a fortement impacté les vêtements. La demande pour les vêtements habillés a brutalement baissé et les acteurs ont dû faire face à une concurrence grandissante de marques vendant directement aux consommateurs et qui savent faire preuve d’ingéniosité sur les réseaux sociaux. Le recul est de 30%.

La crise a moins fortement touché les chaussures grâce à la forte demande en baskets, avec un recul de seulement 12 % à 9 milliards d’euros de chiffre d’affaires. La joaillerie bénéficie d’une demande constante en Asie et a tiré parti des ventes en ligne. La haute joaillerie et les pièces emblématiques d’entrée de gamme connaissent la meilleure performance. Les montres subissent un recul de 30 %. La crise du coronavirus a amplifié les changements déjà importants et durables du modèle de consommation dans ce domaine.

Des préoccupations sociales chez la jeune génération de clients du luxe

Enfin, le cabinet de conseil considère que les préoccupations sociales sont en hausse chez les consommateurs. Cela concerne le développement durable, les questions environnementales, la diversité et l’inclusion. Les plus jeunes générations seraient plus attentives au combat contre l’injustice sociale et raciale. Ce qui donne des consommateurs « militants » à la recherche de marques en adéquation avec leur vision et leur quête de sens.

La marque Céline de LVMH surfe sur le digital pour vendre à distance depuis ses boutiques

Une vente à distance via Facetime ou Zoom

Les cartes se redistribuent entre les canaux de vente digitaux et les magasins dans l’univers du luxe. C’est ce que l’on constate à la vue de la stratégie digitale déployée par Céline, la marque de prêt à porter du groupe LVMH qui s’attache à développer une stratégie omni-canal forte. Les vendeurs de la marque utilisent Facetime, Zoom, etc.

Une réaction sur “Le digital en voie de devenir le principal canal de vente des produits de luxe” :

  1. Philippe Voisin

    En 2017 Cap Gemini faisait état de « l’obsolescences des compétences digitales » en France, Allemagne, Inde, Italie, Pays-Bas, Suède Espagne, Royaume-Uni et Etats Unis dans les secteurs d’activité automobile, banque, biens de consommation, assurances, vente au détail, télécommunications et « utilities ».
    Ces compétences digitales sont surtout celles capables de mobiliser toutes les ressources internes aux objectifs des changements et d’éliminer « les chasses gardées » internes et externes.
    Strategyzer observe 3 niveaux du changement digital : 1. Efficiency Innovation, 2. Sustaining Innovation, et 3. Transformative Innovation. La 3e est radicale et engendre une véritable nouvelle génération qui prend de l’ordre de quinze années pour aboutir.

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