Ce qui est gratuit ne vaut rien. C’est ce mécanisme qui semble agir dans la perception des publicités mobiles ciblées.
Un sondage mené auprès de 287 000 personnes
C’est la conclusion d’une enquête menée par la jeune société Ogury, spécialisée dans l’analyse du parcours client sur le mobile. Près de 300 000 personnes ont été interrogées. C’est un nombre de répondants jamais atteint jusqu’alors sur une enquête de ce type.
90% des internautes trouvent la publicité ciblée irritante
Ogury affirme que le partage consenti et explicite de leurs données par les mobinautes transformera cette perception de « publicité = ennui » en publicité utile, car les internautes auront eu une démarche positive pour accepter de partager leurs données et de recevoir de la publicité en échange de l’accès gratuit au service et au contenu. Il s’agit d’un biais cognitif appelé « choice supportive » pointe Ogury ou « rationalisation post achat », qui consiste pour une personne à attribuer rétroactivement des attributs positifs à une option choisie afin de la justifier auprès d’elle-même et à dévaloriser les options non retenues.
Rendre explicite la règle du jeu
« Quand les utilisateurs choisissent de partager leurs données en échange de contenu gratuit, l’utilité des publicités sera reconnue au-delà de l’ennui qu’elles génèrent » annonce Ogury. L’étude montre que les particuliers ne perçoivent pas ce que les entreprises font de leurs données malgré le RGPD. Rendre explicites et claires les règles du jeu est donc préconisé par Ogury plutôt que ce flou que s’obstinent à entretenir en particulier les géants du Web.
« A moins qu’on ne leur propose un choix juste, il y aura toujours un ressentiment sous-jacent »
Les consommateurs voient alors leurs données de navigation comme leur monnaie d’échange de choix. Ces données révèlent leurs choix et leurs intentions. Mais les avis de consentement proposés actuellement aux consommateurs ne les aident pas à comprendre comment leurs données sont utilisées par les annonceurs. Au bout du compte, les utilisateurs n’en ont rien à faire du RGPD, ils veulent de l’équité et de la clarté dans leurs choix, insiste Ogury.
2 internautes sur 3 prêts à partager leurs données de navigation
Pourtant, plus de 2 internautes sur 3 se déclarent prêts à partager leurs données pour ne pas payer les services qu’ils utilisent. En particulier, 58% sont prêts à partager leurs données de navigation sur le web et sur les apps qu’ils utilisent. Mais les données qui permettent de les identifier génèrent plus de réserve. Ils sont seulement 13% des internautes prêts à partager leurs détails de contacts, tel que leur adresse email. Comme alternative, près de 1 internaute sur 3 (29%) serait prêt à payer plutôt que de partager ses données. Si les Français ne sont que 25% à être prêts à payer, les Allemands sont 33% dans ce cas.
A noter que globalement les internautes souhaitent recevoir les messages publicitaires plutôt par email (41%), via des publicités mobiles (41%) plutôt que par des alertes téléphoniques (18%). Ces alertes téléphoniques sont les « notifications push », et les SMS. On préfère les emails aux Etats Unis et en Espagne. Les Français sont uniques dans ce cadre. Ils sont les seuls à préférer les alertes téléphoniques (34% contre 18% au niveau mondial). Tous les autres pays placent cette option en bas de liste. L’email est le canal le moins apprécié en France pour recevoir des messages marketing. Les alertes téléphoniques en France sont autant appréciées que les publicités mobiles.
Près de 300 000 personnes interrogées
L’étude d’Ogury a été réalisée auprès de 287 000 personnes tirées au sort parmi 400 millions d’utilisateurs mobiles en opt-in dans 6 pays. Neuf questions clés ont été posées sur les sentiments par rapport à la publicité mobile, la vie privée et la donnée. Les six pays étudiés sont la France, l’Italie, l’Espagne, l’Allemagne, la Grande Bretagne et les Etats Unis.
L’enquête a été réalisée à l’aide de la technologie d’Ogury intégrée dans 10 000 applications dans le monde. Les questions ont été traduites dans les langues locales, en adaptant des termes tels que « GDPR » si nécessaire. Par exemple, cela devient « RGPD » pour la France et « DSGVO » pour l’Allemagne. Le groupe d’enquête comprenait un nombre égal d’hommes et de femmes, appartenant à des groupes d’âge allant de 18-24 ans jusqu’à 65 ans et plus. Le sondage a été réalisé dans la période de sept jours à compter du 12 février au 18 février 2019. Le nombre total de répondants a été de 287 571.
Toutes les questions ont été montrées aux répondants dans des interstitiels en pleine page, avec des réponses à choix multiples. Aucune incitation n’était proposée ni donnée aux utilisateurs pour qu’ils répondent aux questions posées, autre que l’occasion de prendre part à une recherche importante. Les résultats ont été traités et analysés par les équipes d’Ogury.
Le RGPD n’améliore rien du tout vu des utilisateurs
Les apports du RGPD (Règlement général de la protection des données) sont globalement très peu mis en avant selon le sondage réalisé par Ogury. Seulement 8% des répondants estiment mieux savoir ce que les entreprises font de leurs données grâce au RGPD. De quoi préoccuper les marketers.
A noter qu’en France, la conscience du RGPD est la plus élevée du panel. Ils sont 20% des Français à estimer mieux comprendre ce qui arrivent à leurs données. Ogury considère que l’activisme de la Cnil dans ce domaine explique ce sentiment des Français. A l’opposé, les consommateurs américains sont ceux qui ont la moindre compréhension des apports du RGPD, avec 5%.
En pratique, les conditions générales d’utilisation de leurs services que publient les fournisseurs d’application web tels que Facebook ou Google déclenchent des réactions mélangées. Après les avoir lues, une légère majorité (52%) des internautes reconnait ne pas comprendre l’usage qui est fait de leurs données. Ils sont toutefois 48% à déclarer qu’ils comprennent la plus grande partie de ce qu’ils ont lu. Plus précisément, après lecture des conditions d’utilisation, les Européens manifestent la plus grande incompréhension de l’usage qui est fait de leurs données. Les Italiens déclarent très majoritairement (66%) ne toujours pas comprendre ce que les entreprises font de leurs données. Idem à 60% pour les Français, les Espagnols et les Allemands. A l’opposé, les Britanniques déclarent comprendre à 57% ce qu’il leur arrive. Et 54% des Américains.
Ces réponses traduisent toutefois une forme d’hypocrisie puisqu’il n’y a que 1 internaute sur 5 (22%) qui lise les conditions d’utilisation en entier. En outre, plus de la moitié de ces 22% n’ont pas une meilleure compréhension de la manière dont leurs données vont être utilisées.
Les Allemands sont plus susceptibles (à 37%) de lire les conditions d’utilisation en entier, face aux 22% en moyenne de personnes qui lisent les conditions d’usage. L’étude souligne qu’il y a des progrès à faire pour clarifier ces conditions d’usage alors qu’il y a des bataillons entiers de professionnels mobilisés pour rendre l’expérience utilisateur la plus fluide possible sur les autres aspects des applications mobiles.