L’inflation des salaires a été lancée par les startups
L’année 2022 s’annonce sous pression;, face à l’inflation qui est de retour, aux risques sur l’alimentation en énergie de l’Europe à cause de la guerre en Ukraine et à la concurrence pour recruter les meilleurs profils, le tout sur fond de changement climatique. « Les mois à venir de 2022 seront cruciaux, notamment sur le plan de la compétition avec les acteurs disruptifs des nouvelles technologies, qui ont récemment participé à une inflation des rémunérations » annonce Bernard-Louis Roques, cofondateur et Directeur Général de Truffle Capital. Le dirigeant fait référence aux startups qui font monter les salaires lors des recrutements car elles doivent réussir leur course à la croissance sous la pression de leurs investisseurs.
Les acteurs de l’édition de logiciels, le plus souvent sont bien capitalisés et dégageant une marge solide
« Les acteurs de l’édition de logiciels, le plus souvent bien capitalisés et dégageant une marge solide, seront en toute probabilité à même de soutenir cette compétition, particulièrement alors que les rouages du financement externe se grippent de plus en plus » prédit-il. Il souligne que la crise du Covid est allée dans le sens du développement du secteur du logiciel en accélérant l’adoption du numérique.
« 97% des éditeurs ont vu leur chiffre d’affaires augmenter » pointe pour sa part Nadia Idrissi, Présidente de teknowlogy | CXP-PAC. « Rappelons qu’en 2020, 36 % des entreprises avaient vu leur chiffre d’affaires baisser » relève-t-elle. « Les ETI [Entreprises de taille intermédiaire] ont besoin de poursuivre leur transformation numérique et elles génèrent de l’activité pour les éditeurs, ce qui a pu permettre des records pour certains éditeurs en 2021 » dit-elle. « Même si la prudence est de mise, le moral reste élevé et la dynamique excellente » se réjouit la responsable.
Les 100 premiers éditeurs français ont connu une croissance globale de +10%
Le classement « Truffle 100 » de 2021 marque la 16ème année de croissance du secteur de l’édition de logiciels en France, avec +10% pour le chiffre d’affaires total des 100 entreprises constituant le « Truffle 100 ». Ces 100 éditeurs réunis atteignent un chiffre d’affaires total de 22 milliards d’euros en 2021. C’est une goutte d’eau face à certains poids lourds américains. Pour mémoire, comparativement le chiffre d’affaires total de Microsoft est de 168 milliards de dollars et celui d’Oracle est de 42 milliards de dollars. Oracle à lui seul pèse ainsi le double des 100 premiers éditeurs français réunis.
Dassault Systèmes fait figure d’Ovni avec son chiffre d’affaires de 4,8 milliards d’euros
Dans ce classement, comme d’habitude, Dassault Systèmes fait figure d’Ovni tant son chiffre d’affaires de 4,8 milliards d’euros est hors norme pour la France. Il est en tête du palmarès grâce à ses logiciels de conception 3D. Son chiffre d’affaires dépasse les 20% du total des 100 éditeurs.
Point de préoccupation, le palmarès révèle que depuis 2 ans, le secteur connait une érosion de sa rentabilité. Elle s’élève désormais à 9,1% du chiffre d’affaires, c’est le plus bas niveau depuis 2019. Truffle estime que cette baisse de la rentabilité s’explique par le poids plus important des investissements liés à la transition vers le modèle SaaS (Software as a Service) et la migration vers le Cloud mais aussi ceux liés à l’intelligence artificielle.
Le secteur français du logiciel parvient toujours à se financer
Truffle observe que malgré cela, le secteur français du logiciel parvient cependant toujours à se financer. C’est une espèce de paradoxe car ces entreprises, contrairement aux startups, ont du mal à accéder aux marchés financiers, et subissent la prudence croissante du marché du capital risque. Seulement 20 entreprises du Truffle 100 sont cotées en bourse et seulement 22 éditeurs ont un investisseur en capital risque.
Deux tiers des éditeurs anticipent une croissance de leur activité supérieure à +6%
« Le secteur de l’édition de logiciels ne répond pas à la même logique que celle des startups. En effet, ce secteur est autofinancé et n’utilise que peu de financement externe » explique Bernard-Louis Roques. Au bout du compte, ces éditeurs de logiciels sont en grande partie optimistes pour 2022. Deux tiers d’entre eux anticipent une croissance de leur activité supérieure à +6% avec notamment le Cloud (Saas, PaaS, laaS) qui reste la principale tendance technologique tirant le marché en 2022.
A ce jour, 5 éditeurs sur 6 proposent une offre Cloud en mode SaaS. Ce chiffre est stable. Truffle y voit la preuve que ce modèle commence à trouver son équilibre et son stade de maturité. C’est surtout un levier de croissance. « Cette croissance est largement soutenue par la montée en puissance du Cloud génératrice de croissance du fait de la transition technologique du parc installé encore fortement Client Serveur. La cybersécurité et les applications des nouvelles technologiques comme l’intelligence artificielle et le Machine Learning en sont les corollaires » explique Nadia Idrissi.
Des personnels hautement qualifiés et locaux à la France
L’industrie française du logiciel emploie 176 000 personnes en 2021. En 2020, les emplois en R&D augmentaient à un rythme trois fois plus élevé que le reste des emplois du secteur. Les éditeurs ralentissent leurs recrutements en Recherche & Développement. Cette année, les emplois en R&D semblent se stabiliser à un rythme similaire à celui du secteur du logiciel.
Qui dit éditeurs français dit a priori une meilleure protection de leurs clients entreprises contre les lois extraterritoriales américaines. « Cette industrie croît malgré les turbulences, recrute et forme localement des personnes hautement qualifiées. Elle participe ainsi activement à la souveraineté numérique de notre pays » souligne Bernard-Louis Roques, directeur général de Truffle Capital. Même le risque de l’inflation ne l’inquiète pas, puisque les éditeurs auront toujours la possibilité d’augmenter leurs tarifs s’il devient nécessaire de protéger leurs marges.