Numérique : l’industrie ne doit pas être aveugle comme la musique ou la presse, selon François Bourdoncle

En matière de Big Data et de numérique, il faut passer du « comment » au « quoi » et au « pourquoi », conseille François Bourdoncle, polytechnicien et membre de la commission Lauvergeon  « Innovation 2030 » initiée par le ministère du redressement productif. Il est également directeur technique d’Exalead, société qui développe un moteur de recherche pour les entreprises, filiale de Dassault Systèmes. Il s’exprimait le 14 novembre, lors de l’événement Big Data, organisé à Paris par l’Aproged et la Big Data Alliance.

Il constate que depuis 10 à 15 ans, l’innovation technologique vient du grand public. « Pour la commission Lauvergeon, cette nouvelle vague d’innovation est un enjeu de transformation du business » prévient-il.

Il faut éviter le déni face au danger

Pour lui, « il faut éviter que ne se reproduise l’aveuglement que la musique, la presse ou le commerce ont connu. Il faut éviter le déni , c’est une forme de défense extrêmement dangereuse. »  Il faut éviter le « jusque là tout va bien [NDLR : il se masque les yeux]» insiste-t-il. De nouveaux secteurs vont être touchés. « Cela va toucher la santé, avec le ‘Quantified Self’, qui va permettre au secteur de la santé de passer du curatif au préventif. Idem  pour l’assurance, c’est un enjeu critique. Google vient d’acheter une société d’assurance et veut dans le même temps rassurer, en déclarant  ‘on ne va pas faire ce que vous faites, c’est trop compliqué’, mais cela rappelle des souvenirs » s’inquiète François Bourdoncle.

D’autant plus que pour lui, il y a une vraie demande de produits personnalisés dans ce domaine de l’assurance. « En France, il y a une schizophrénie sociétale sur le sujet » relève-t-il. Il poursuit : « on ne veut pas que l’on touche à ses données personnelles mais dans le même temps on ne veut pas payer plus cher ou pareil pour son assurance que son voisin qui boit, fume, et conduit comme un fou. » Au final, « les choses vont arriver autant être prêt avec des sociétés françaises » conseille-t-il.

Il faut transformer les entreprises

Autre conviction, « le Big Data ce n’est pas un problème technologique, même s’il y aura des problèmes techniques à résoudre, c’est un problème de business transformation » insiste-t-il.  Il ne veut pas que les grands groupes français loupent cette transformation. « Il faut éviter que les secteurs non touchés par le numérique ne soient touchés comme l’ont été la musique, la presse ou le commerce » reprend-il. « Il faudra plus de formation, et s’appuyer sur la formation continue. Faisons réussir les Français en France, plutôt que nos statisticiens aillent réussir à la city à la Londres » s’enflamme-t-il. Et de conclure : « les modes de protection de la vie privée sont un atout en France. »

Photo, de gauche à droite : Charles Huot de l’Alliance Big Data, Michel Moulinet de Alma Consulting, François Bourdoncle de Dassault Système, Stephan Clemençon de l’institut Mines Télécoms et Dominique Cotte, de l’Aproged.